Mesure et interprétation de la parallaxe de Mars

L’expérience

Depuis l’expérience de Cassini et Richer, la technologie a bien évolué. Une expérience à la limite de la technologie à l’époque est maintenant bien plus facile à effectuer. Le GPS et la photo numérique sont maintenant à notre secours, mais le fait de recommencer cette expérience unique et d’y réfléchir montre bien les capacités impressionnantes d’expérimentation des savants de l’époque : Il s’agissait de pouvoir mesurer une parallaxe de quelques secondes d’arc (à la limite de la résolution des optiques de l’époque) en se synchronisant après plusieurs mois de voyage et d’installation sur place.

Nous avons donc effectué de nouveau cette expérience unique en mesurant précisément la position de Mars à partir de deux points éloignés de 10000 km : Entre Paris et la Réunion. La puissance de la méthode de mesure donne le tournis : il s’agit de mesurer une distance 10000 fois plus importante que celle qui nous sépare, et ceci avec une erreur inférieure à 10% !

L’expérimentation

Une fois le calcul théorique de la parallaxe déterminé, lançons nous maintenant dans l’expérience !

Pour nous simplifier la tâche, la même configuration est utilisée à Paris et à la Réunion : 2 télescopes Schmidt Cassegrain de 200 mm montés sur une monture équatoriale motorisée et un appareil photo numérique placé au foyer. La focale d’environ 2m nous donne un échantillonnage satisfaisant de 0.5″ d’arc par pixel environ, ce qui nous laisse espérer une parallaxe d’environ 34 pixels.

A l’observatoire des Makes, c’est la saison estivale. Mais au même moment, aux environs de Paris, la nuit est glaciale, il fait -10° ! Nous sommes isolés en plein champ, mais même là, la technologie moderne nous aide : Emails et SMS permettent d’échanger des messages de synchronisation entre les deux sites par un Iphone ! La synchronisation est ensuite effectuée à l’aide du GPS à la seconde près. L’idée des télescopes synchronisés à 10000 km de distance et à la seconde nous met dans l’ambiance !

L’image suivante montre deux photos superposées, alignées sur les étoiles, et met en évidence la parallaxe de Mars :

Les deux photos superposées mettent en évidence la parallaxe de Mars

L’exploitation des résultats

Une fois l’expérimentation réalisée, passons maintenant au dépouillement des résultats : Il s’agit de mesurer le plus précisément possible la parallaxe entre des couples de clichés prises simultanément.

Bien que la configuration soit identique à Paris et à la Réunion, une première étape est nécessaire pour connaitre exactement l’échantillonnage en arcsecondes par pixel. Pour cela, nous mesurons la position très précise de 6 étoiles de référence visibles sur les deux clichés. Cette mesure se fait manuellement par la fonction « PSF » d’IRIS. La distance euclidienne entre deux des étoiles de référence et leur écart angulaire théorique donné par un logiciel de carte du ciel nous permet de déterminer le taux d’échantillonnage de l’instrument très précisément.

La deuxième étape est de mesurer la parallaxe sur des images qui ne sont pas forcément registrées de façon identique. Afin de travailler dans un repère commun entre les deux images, nous choisissons de calculer la position de Mars dans un repère mobile constitué d’un vecteur formé par deux étoiles de référence et par le vecteur perpendiculaire associé. Dans ce processus, la plus grande difficulté est de mesurer très précisément la position de Mars. En effet, la magnitude très forte de Mars sature fortement la capteur si on veut en même temps des étoiles de magnitude 12 environ. Afin d’être le plus précis possible, nous avons choisi de placer des fils devant les télescope et de mesurer l’intersection des aigrettes ainsi formées. Après la comparaison de plusieurs méthodes possible, une mesure manuelle minutieuse sous Photoshop s’est révélée la plus fiable.

En réalisant cette méthode sur les images de Paris et de la Réunion, nous pouvons enfin déterminer la parallaxe en calculant la distance euclidienne dans les repères mobiles des deux images. Notons qu’avec 6 étoiles de référence, nous obtenons 15 repères différents, soit autant de mesure de parallaxes. Et avec 6 séries de clichés, nous obtenons une centaine de mesure.

La médiane de toutes les mesures est de 15.75 secondes d’arc, la moyenne de 15.6 et l’écart moyen de 0.6.

On a retenu finalement la médiane de toutes les valeurs obtenues, soit 15.75″ d’arc (au lieu de 17.4 donné par les éphémérides). En utilisant la [formule de parallaxe-art4], nous avons trouvé 109 millions de km (au lieu de 99 millions de km). Soit une erreur de 9%. C’est pas mal pour une première expérience et une opposition défavorable.

La médiane de toutes les mesures est de 15.75 secondes d’arc, la moyenne de 15.6 et l’écart moyen de 0.6.

On a retenu finalement la médiane de toutes les valeurs obtenues, soit 15.75″ d’arc (au lieu de 17.4 donné par les éphémérides). En utilisant la [formule de parallaxe-art4], nous avons trouvé 109 millions de km (au lieu de 99 millions de km). Soit une erreur de 9%. C’est pas mal pour une première expérience et une opposition défavorable.

SPIP